En octobre dernier, à seulement quelques jours de l’élection présidentielle américaine, Marjorie Paillon se présentait à nous et nous expliquait les tenants et aboutissants de l’élection (l’interview du 31 octobre 2008 ). Nous retrouvons Marjorie aujourd’hui, jour de l’investiture de Barack Obama en tant que 44ème Président des Etats-Unis.
Marjorie avant de parler de l’investiture, revenons sur l’élection du 4 novembre que vous nous avez fait vivre depuis la QG républicain de Phœnix, sans oublier les mois de campagne que vous avez suivi de près.
Quelle est votre analyse de cette élection de Barack Obama ? Quelles ont été les grandes clés de la victoire de Barack Obama / de la défaite de McCain ?
Je vais paraphraser Bill Clinton. « It’s the economy, stupid ! » La défaite de John McCain vient principalement de la crise de Wall Street. C’est très précisément à ce moment que la cause a été entendue pour lui. Devant son incapacité à parler de la crise, il a laissé le champ libre à l’équipe d’Obama pour s’adresser directement au peuple américain et lui dire, les yeux dans les yeux, qu’il comprenait leur situation (je fais notamment référence ici au clip de 30 minutes diffusé sur les plus grands canaux américains à quelques jours du scrutin final).
Et puis, John McCain n’a jamais été maitre de sa propre campagne. Les dissensions de son équipe lui ont coûté l’élection. D’ailleurs, le meilleur discours qu’il ait prononcé a été celui de la nuit du 4 novembre. En concédant la victoire à Barack Obama, il s’est montré digne, fidèle à l’image de héros américain qu’on attendait de lui. Oui, mais trop tard.
L’intelligence de Barack Obama a été de se mettre au niveau des classes moyennes. De parler aux ouvriers. De se retrousser les manches et de faire de cette élection un projet collectif pour faire avancer la société américaine. Il a adopté la même attitude pour mener à bien sa campagne sur Internet. En donnant 5, 10 ou 20 dollars, chaque donateur devenait un ambassadeur à part entière de la campagne d’Obama. Et avait le sentiment de participer à un élan collectif, un élan américain. Et il est difficile d’arrêter un élan de cette ampleur.
Que retirez-vous de cette expérience tant du point de vue professionnel que personnel ?
Couvrir une élection présidentielle américaine est un événement dont chaque journaliste rêve. On est plongé en plein cœur d’une bataille peu commune pour la Maison Blanche. On goûte à la politique en action. C’est une année (voir deux !) galvanisante, passionnante, mais qui demande beaucoup d’assiduité et de persévérance. Je suis aussi très heureuse d’avoir pu écrire sur le parti Républicain et John McCain. C’était le moment ou jamais pour pouvoir analyser l’état de ce parti après 8 ans d’années Bush. Cela m’a permis de rencontrer de nombreux conseillers politiques de la Maison Blanche, des éditorialistes américains, entamer un « road trip » électoral auprès des « vrais » américains, et témoigner de multitudes d’histoires personnelles qui font l’Histoire. Personnellement, je pense que mon histoire avec le journalisme et la politique américaine en sort renforcée. J’ai fait mes premiers pas journalistiques à Washington en 2003. On revient toujours à ses premiers amours.
Nous l’avons vu, BFM TV met en place un dispositif spécial pour couvrir l’investiture de Barack Obama à la Présidence des Etats-Unis (article ici ). Quelles vont être vos responsabilités dans ce dispositif ?
BFM TV se mobilise tout au long de cette journée pour vous faire vivre les cérémonies d’investiture en direct. Nous serons bien sur à Washington avec notre correspondant Thierry Arnaud , mais aussi en Californie pour prendre le pouls de la côte Ouest.
De 16h00 à 20h00, place à Barack Obama. Je serai sur le plateau de BFMTV pour suivre et alimenter le cœur de notre édition spéciale, aux côtés de Thomas Misrachi , Florence Duprat , Oliver Truchot , Alain Marschall et nos invités.
Les analyses et moments forts de la journée reviendront dans les éditions du soir, dès 20h00 avec Thomas Sotto , entre 21h00 et minuit avec Ronald Guintrange et Nathalie Lévy et à 22h00 chez Karl Zéro .
Presque deux mois après son élection Barack Obama va être investit dans sa fonction. Cette latence dans la prise du pouvoir ne lui est-elle pas préjudiciable sur le terrain de la politique intérieure (crise économique et rapidité d’action), mais aussi en politique extérieure, par exemple l’absence de prise de position sur la guerre à Gaza ?
Non. C’est un délais constitutionnel incompressible. Barack Obama l’a répété pendant toute cette phase de transition : il n’y a qu’un seul président en exercice. Il a donc laissé à l’administration Bush achever son mandat, tout en étant concerté lors des dernières prises de décisions du 43ème président. Comme cela a été le cas sur le plan de sauvetage de l’industrie automobile par exemple. De plus, le président élu reçoit les même « intelligence briefing » que le président en exercice, afin d’être informé de la situation du pays chaque jour. Enfin, Barack Obama a mis en place un équipe de transition efficace aux lendemains de son élection. Il a fait de Chicago le Q.G. de cette équipe, qui s’est mise au travail tout de suite.
Son long silence sur Gaza s’explique de la même façon. Il n’était pas président en exercice au moment de la crise. Il ne pouvait donc pas prendre une position au nom des Etats-Unis. Ceci dit, Obama s’est exprimé sur le conflit israélo-palestinien pendant sa campagne. Et le fait de choisir Hillary Clinton comme Secretary of State est déjà un indicateur.
Que vous inspire le gouvernement « d’ouverture » et donnant la place à la diversité, qu’il a formé ? Bien armé pour passer à l’action ?
C’est une administration résolument « ouverte » sur la société américaine. Bien que Bill Richardson se soit retiré du poste de secrétaire d’Etat au commerce, pour des affaires qui le touchent en tant que Gouverneur du Nouveau Mexique, Barack Obama a veillé à ce que son gouvernement reflète la diversité. Des secrétaires d’Etat noirs (Eric Holder, ministre de la Justice), asiatiques (Steven Chu, secrétaire à l’Energie ou Eric Shinseki, secrétaire aux Anciens combattants), des femmes (Susan Rice, représentante des Etats-Unis à l’ONU, ou Janet Napolitano, secrétaire à la sécurité intérieure), et même des Républicains (Robert Gates, conservé dans ses fonctions de secrétaire à la Défense) et son ancienne rivale Hillary Clinton.
Mais surtout, des hommes et des femmes expérimentés, qui ont été choisis pour leurs qualifications et leur aptitude à prendre les problèmes de l’Amérique à bras le corps.
Marjorie vous êtes aussi co-fondatrice de Ilovepolitics. Quelle va être la ligne du site : actu générales sur la politique américaine ou un suivi plus particulier des actions de l’administration Obama ?
Ilovepolitics.info continue sur sa lancée. Vous avez été plus de 900 000 internautes à nous suivre sur cette année électorale. Nous espérons continuer à vous faire découvrir les buzz, les informations décalées de cette présidence. Le blog reste aussi un espace de débat avec les analyses de notre partenaire, l’IRIS, les archives de l’INA. Nous allons développer nos partenariats en France et à l’étranger pour vous offrir la meilleure information possible et continuer à décrypter l’actualité politique américaine en ligne.
Merci Marjorie et bonne continuation
Par Damien D.
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Merci Marjorie !
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